Et si la prise en compte du recyclage des précipitations devenait un facteur de coopération internationale ? Et si la préservation des forêts et le développement de l’agroforesterie renforçaient la régularité des pluies continentales ?

Et si la prise en compte du recyclage des précipitations devenait un facteur de coopération internationale ? Et si la préservation des forêts et le développement de l’agroforesterie renforçaient la régularité des pluies continentales ?
Généralement, la gouvernance mondiale de l’eau fait écho au concept d’hydro-diplomatie. Cette méthode vise à concilier la vision des diplomates et celle des ingénieurs afin d’intégrer la gestion de l’eau dans les négociations internationales. Elle concerne généralement la gestion d’un bassin fluvial (tel que le Nil, qui traverse 8 pays). Toutefois, cette gouvernance internationale devrait également prendre en compte le recyclage des précipitations.
En effet, de nombreux chercheurs travaillent sur le concept de “bassin de précipitations” (“precipitationshed”), à la suite d’une publication fondatrice en la matière en 2012. L’étude “Moving from fit to fitness for governing water in the Anthropocene”, publiée en 2024, met en évidence les interdépendances liées au recyclage des précipitations. Ce processus hydrologique fait qu’une partie de l’eau évapotranspirée à partir d’une zone contribue aux précipitations futures. Ainsi, “l’humidité qui s’évapore du continent eurasien est responsable de 80 % des ressources en eau de la Chine”.
Comme nous l’avions montré dans un post précédent, la pluie ne connaît pas nos frontières politiques. L’étude de 2024 abonde : “De solides données montrent que les cycles hydrologiques sont étroitement liés à des échelles spatiales plus vastes, ce qui implique un possible élargissement des frontières généralement prises en compte dans l’étude et la gouvernance de l’eau.”
Aussi, tout processus d’artificialisation des sols dans une zone donnée aura un impact sur les précipitations sous le vent, et donc sur un territoire voisin. Les auteurs de l’étude “Upwind forests: managing moisture recycling for nature-based resilience “ parlent de “precipitationshed”, mais aussi d’”evaporationshed”, ou bassin d’évaporation. Ces concepts visent à cartographier les flux d’humidité atmosphérique en identifiant les régions sources et réceptrices de précipitations.
La question de l’utilisation ciblée des forêts et de l’agroforesterie pour améliorer les pluies sous le vent se pose donc avec acuité. Des efforts de reforestation stratégiques pourraient permettre aux cultures agricoles de bénéficier d’un apport hydrique suffisant en période sèche. Une étude de 2019 estime que “jusqu’à 74% des précipitations estivales sur les bassins versants européens dépendent de l’humidité apportée par d’autres bassins versants.”
Plusieurs de nos articles [8] reviennent sur des méthodes préconisées par les chercheurs pour une mise en œuvre effective de ces processus de reforestations stratégiques.
Ne serait-il pas le moment de se mobiliser collectivement et massivement pour inciter le politique à prendre en compte ces sujets ?

