Trop méconnue, la théorie des « deux jambes du climat » offre une clé de lecture cruciale pour mieux appréhender les enjeux environnementaux actuels.
Développée notamment par l’Espagnol Millán M. Millán, elle propose un changement de perspective par rapport aux politiques climatiques menées depuis un demi-siècle qui, en se focalisant sur les émissions de CO2, ont occulté le rôle décisif joué par les sols dans la régulation des températures

Décédé en janvier 2024, le chercheur en physique atmosphérique Millán Millán, dont nous avions présenté les travaux dans un article précédent, a étudié les interactions entre les sols, la végétation et le climat.
Dans un article publié en juillet 2023, l’écrivain @Rob Lewis présente ainsi la problématique soulevée par Millán: « Le changement climatique est généralement décrit comme ayant une flèche de causalité pointant vers le bas, de l’atmosphère vers la surface de la terre, celle-ci agissant comme un récepteur passif du changement climatique. Mais la flèche pointe également vers le haut, à partir des sols, ceux-ci se comportant non seulement comme un récepteur climatique, mais aussi comme un moteur du climat. »
Cette approche à deux volets a été initiée dans les années 1960 par le climatologue canadien Ted Munn, dont Millán fut le disciple. En étudiant de près le fonctionnement de la couche limite, la plus basse de l’atmosphère, en contact avec la surface de la Terre et directement affectée par elle, il a mis en évidence l’impact des systèmes vivants sur le climat.
Principalement composées d’eau, les espèces animales et végétales jouent un rôle important dans sa captation et sa redistribution à l’échelle locale. Et comme l’indique Millán Millán, « ce cercle s’amplifie : l’eau, à travers la vie, engendre plus d’eau, engendre encore plus de vie, recueille encore plus d’eau, et elle continue ainsi, entraînant un refroidissement et une modération accrus du climat. »
La théorie des deux jambes du climat ne néglige pas pour autant l’impact des émissions de CO2 à l’échelle globale. « Les gaz à effet de serre et l’utilisation des terres contribuent tous deux au changement climatique, mais à des rythmes différents », souligne Millán. Si les effets du CO2 s’observent sur le temps long, ceux de l’artificialisation des sols modifient immédiatement le cycle hydrologique.
Autrefois prise en compte dans le débat mondial autour du changement climatique, l’approche à deux volets du climat a été mise de côté à la fin des années 1970, au profit d’une vision centrée sur la nécessaire réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Il est urgent de revenir à cette conception moins unilatérale de la question climatique, notamment parce qu’elle ouvre le champ des moyens d’actions possibles.
La démarche de l’Autoroute de la Pluie s’inscrit résolument dans cette idée : les sols et la végétation ont un rôle décisif à jouer dans la lutte contre le réchauffement.










