Initiative de réappropriation climatique

Catégorie : agriculture syntropique

La syntropie, une piste crédible pour l’agriculture industrielle

Image issue de Mongabay

🌴🌾🚜La syntropie émerge comme une piste d’inspiration de plus en plus crédible pour l’agriculture industrielle.

Au Brésil, l’agriculture syntropique développée par le Suisse Ernst Götsch n’en finit plus de faire ses preuves, au point de séduire les dirigeants de grandes exploitations en monoculture.

Installé depuis les années 1980 dans l’Etat de Bahia, au Brésil, Ernst Götsch a consacré sa vie à l’agroforesterie, avec la volonté farouche de mettre en pratique ses ambitieuses théories de l’agriculture syntropique.

Nous avons déjà présenté le concept de syntropie à travers trois posts déjà publiés (voir les posts LinkedIn ici, et ou chercher « syntropie » sur le site). Son principe fondamental est de composer avec la complexité et la dynamique du vivant plutôt que de lutter contre. En pratique, cela revient à favoriser la production d’une biomasse abondante et très diversifiée et à augmenter le taux de restitution au sol. Cela passe notamment par des mécanismes de strates et de successions, pour permettre l’émergence d’un écosystème diversifié.

Au cours des trente dernières années, Götsch a expérimenté cette approche sur une zone de 120 hectares dans le sud de Bahia. Au moment où elles lui ont été confiées, ces terres étaient recouvertes par une prairie touffue et considérées comme peu fertiles. Le chercheur s’est fixé comme objectif de les transformer en une forêt dense tout en y plantant du cacao qui y trouve protection.

En développant les méthodes de l’agriculture syntropique, Götsch a obtenu des résultats spectaculaires et transformé radicalement le paysage local. Il a aussi contribué à créer un microclimat dans une région touchée par des sécheresses récurrentes. « Lorsque vous survolez, vous ne voyez plus mon exploitation car il y a des nuages ​​ici toute l’année », illustre-t-il.

Sur le plan agricole, l’expérience a également été concluante. Alors que les autorités compétentes jugeaient la zone comme impropre à la culture de cacao, la plantation d’Ernst Götsch a progressivement atteint un rendement équivalent à celui d’exploitations conventionnelles, pour des coûts inférieurs et sans utilisation de pesticides.

Cet argument n’a pas laissé insensible un certain nombre de grands agriculteurs de l’Etat de Bahia, en quête de solutions pour sortir de la dépendance aux pesticides, dont les impacts négatifs sur la fertilité des sols ont provoqué une importante baisse de la productivité.

On peut mentionner l’exemple de Paulo Borges, propriétaire de 10 000 hectares de plantations de soja dans la région. Lui et d’autres agriculteurs de la région sont accompagnés par Götsch afin de limiter au maximum l’usage de produits phytosanitaires. Au moment de faire cette annonce, en 2020, Paulo Borges espérait pouvoir s’en passer complètement sur son exploitation d’ici 10 ans. 

Nous n’avons pas trouvé d’informations sur la mise en pratique de ce changement depuis. N’hésitez pas à nous éclairer sur cette question !

#syntropie #brazil #agroforesterie

Maïs et climat aux USA

🌽Comment la culture du maïs à changé le climat de la Corn Belt ?🌦️

Une étude publiée dans Geophysical Research Letters révèle que l’intensification de l’agriculture dans le centre des États-Unis au cours du XXe siècle a entraîné, durant la période estivale, une baisse des températures et une augmentation des précipitations, en contradiction avec la tendance mondiale au réchauffement climatique.

L’étude, dirigée par des scientifiques de l’université de l’Iowa et du National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA), a analysé des données climatiques et agricoles sur une période de 100 ans. La région étudiée, la Corn Belt, correspond aux États américains du Midwest (Iowa, Illinois et Wisconsin, entre autres).

Les résultats indiquent que l’intensification agricole (qui comprend, hélas, l’augmentation de l’utilisation d’engrais et de pesticides) a modifié les échanges d’énergie entre la surface terrestre et l’atmosphère, conduisant à un refroidissement estival régional.

Cette découverte met en lumière l’impact de l’agriculture sur le climat régional. Les pratiques agricoles peuvent avoir des effets complexes et parfois contre-intuitifs. Entre 1950 à 2010, la quantité de maïs récoltée chaque année dans la Corn Belt a augmenté de 400 %, alors que cette plante présente de très importantes capacités d’évapotranspiration estivale.

Malheureusement, cette tendance climatique positive résulte d’une approche basée sur l’intensification technologique et l’usage d’intrants, qui n’est ni soutenable ni souhaitable. Elle a eu pour corollaire une intensification de l’irrigation et une inflation de l’usage de pesticides et surtout la perte d’un tiers de couches de surface riche en carbone et des problèmes de pollution de l’eau aux nitrates. Il faut donc rester prudent sur ces résultats qui peuvent masquer d’autres impacts délétères.

Et une autre étude sur cette thématique, alerte : “si la croissance de la production de maïs et de soja devait stagner, la capacité de la rétroaction culture-climat à masquer le réchauffement s’atténuerait, exposant les cultures américaines à des températures extrêmes plus nocives.”

Vous l’aurez compris, au travers de cet exemple nous ne cherchons pas à faire la promotion de pratiques culturales intensives, mais bien de mettre en avant l’interaction entre cultures agricoles et climat.

En outre, le maïs, pour beaucoup devenu le symbole d’une agriculture intensive et des élevages hors sol, reste une plante aux capacités de mycorhization et de photosynthèse (plante dite C4) extraordinaires.

Ainsi, la culture associée des “trois sœurs” (maïs, haricot et courge) ou milpa, est un mode de culture associé propre aux peuples amérindiens, qui peut, par sa stratification, rappeler l’agriculture syntropique. Décidément, nous n’avons pas fini d’apprendre des jardins américains.

N’est-il pas temps d’examiner sérieusement les possibilités offertes par l’agroforesterie et l’agriculture syntropique pour nos territoires ?

L’impact climatique du mode d’occupation des sols

Bon nombre de recherches démontrent que les modes d’occupation des sols impactent fortement le climat. Malgré que ce constat soit progressivement compris, il tarde à infuser dans les politiques d’aménagement du territoire. On peut ainsi se demander pourquoi une approche systémique n’est pas adoptée pour maximiser l’impact d’une gestion vertueuse des sols.

L’étude Land use still matters after deforestation, publiée en 2023 par des chercheurs, majoritairement brésiliens, décrypte les impacts de la déforestation et des modes d’usages des sols en Amazonie et dans le Cerrado. L’étude porte sur le Brésil mais, les mêmes causes engendrant les mêmes effets, on se doit d’évaluer avec attention ces impacts en Europe occidentale. L’étude se concentre sur l’évaluation de l’utilisation des zones déboisées depuis les années 1970, alors que la surface de culture de soja, par exemple, y a décuplé entre 2000 et 2019.

🌡️Il en ressort que la conversion de forêts en terres agricoles (légumineuses et céréales), cultivées de manière conventionnelle, peut entraîner une augmentation de la température de surface trois fois plus élevée que la conversion en pâturages.

🌥️ Cela est dû au fait que la gestion intensive des terres réduit la transpiration des plantes et provoque des changements dans l’équilibre énergétique de la surface. Ceci est clairement représenté dans l’illustration du post, où certains sols de cultures céréalières atteignent 55° c.

☀️En outre, l’expansion des terres cultivées et la création de grandes zones déboisées continues peuvent réduire considérablement les précipitations, par la perturbation du cycle de l’eau. La limite de déboisement pour ne pas enclencher ce cycle est estimée à 10 km2.

Les auteurs recommandent l’adoption de l’agroforesterie et de l’agriculture syntropique pour cultiver les zones défrichées. Plus généralement, la stratification des écosystèmes et l’introduction de l’arbre dans le système agricole sont plébiscités.

La mention de la syntropie fait écho à notre série de posts sur cette approche particulièrement adaptée aux enjeux du dérèglement climatique et de l’érosion brutale de la biodiversité ( voir [3, 4 et 5]). L’agroécologie atténuerait sensiblement les impacts de la déforestation.

Les auteurs préconisent également de travailler étroitement avec le secteur agricole, “et non contre lui. Il est peu probable que le fait de pointer du doigt aboutisse à des progrès.  Cette étude est donc particulièrement d’actualité, tant les débats sur la question agricole sont polarisés.

Le projet de l’Autoroute de la Pluie s’inscrit dans une perspective similaire. N’est-il pas urgent de réintroduire de la stratification dans nos systèmes agricoles, tout particulièrement céréaliers ? Pour cela, notre collectif œuvre à la construction d’un corridor agroforestier dans le Lauragais. Nous avons besoin de toutes les énergies pour le faire advenir et pour replacer la photosynthèse au cœur de nos psychés.

Fièrement propulsé par WordPress & Thème par Anders Norén